Gestion d'entreprise de l'industrie de la carrosserie, Isabelle Havasy, Nouvelles
QUAND LA VRAIE CONVERSATION S’IMPOSE
(Article publié dans le magazine L’Automobile Carrosserie, octobre 2023)
Par Isabelle Havasy
Tony Sutera Sardo connaît bien le domaine de la carrosserie et celui des assureurs. Armé de son DEP (diplôme d’études professionnelles) en carrosserie, il a débuté sa carrière dans l’univers automobile à 19 ans.
« J’ai travaillé durant huit années en carrosserie comme peintre et débosseleur pour expérimenter toutes les facettes du métier », explique M. Sutera Sardo. Voulant en apprendre davantage, il suit une formation en évaluation de dommages automobiles qui lui permettra de devenir estimateur indépendant. « C’était une profession complexe avec un aspect client qui m’intéressait. Je savais que posséder une bonne base en réparation constituait un atout. Cela facilitait la compréhension et l’analyse des dégâts sur les véhicules. »
Des relations tendues
Ses connaissances du milieu et du quotidien des carrossiers l’aident, dans son nouvel emploi, à établir de bonnes relations, « parce que j’étais capable de parler le même langage qu’eux », renchérit M. Sutera Sardo. À ses débuts, dans les années 1990, les rapports carrossiers-assureurs étaient tendus, « c’était plus un argument qu’une conversation. » À chacune de ses visites en atelier, le personnel était sur la défensive sachant pertinemment que l’un des objectifs premiers des assureurs consistait à réduire au maximum les coûts. Le carrossier subissait de la pression. Il se devait de remettre en état le véhicule, tout en respectant les valeurs établies par l’assureur par crainte de ne plus être dans ses bonnes grâces.
Tel un médiateur, M. Sutera Sardo faisait le pont entre le client, le carrossier et l’assureur. Durant ces années passées à travailler à son compte, il a bâti une relation de confiance avec de nombreux ateliers. Ce précieux bagage va lui servir jusque dans son poste de directeur national des fournisseurs pour un assureur majeur nord-américain. « J’étais en contact direct avec les carrossiers, mais aussi avec leur bannière. Les assureurs ont besoin de personnes qui comprennent le secteur dans son ensemble. Des gens qui ont une vision globale et qui sont capables d’expliquer ce qui ne fonctionne pas du côté des carrossiers. »
Quand la technologie affecte la rentabilité
Le métier de carrossier a évolué, une évolution forcée en raison de la complexité croissante des véhicules. « Contrairement à autrefois, les marges de manœuvre sont aujourd’hui quasi inexistantes. Il faut s’assurer de tout remettre à la perfection afin que les systèmes fonctionnent adéquatement. » Les nouvelles technologies des véhicules requièrent des techniciens spécialisés. Par contre, leur salaire plus élevé gruge une part des profits, affectant du même coup la rentabilité de l’entreprise.
« Si les assureurs veulent que les véhicules se réparent de façon rapide et efficace, ils devront s’impliquer plus, notamment au niveau de la formation des techniciens », précise M. Sutera Sardo. Au fil des années, les assureurs ont refilé certaines tâches administratives aux carrossiers. « Au début, c’était le bienvenu. Ça donnait de l’ouvrage. » Cependant, dans le contexte actuel de pénurie de main-d’œuvre, ils peinent à suffire à la tâche.
L’heure des comptes
Les assureurs ont leur part de responsabilité. Ils peuvent contribuer à améliorer la rentabilité de leurs partenaires-carrossiers, lesquels représentent l’assureur auprès du client. « Un atelier non rentable ne le sera pas non plus pour l’assureur. » Ainsi, pour le bien des parties concernées, et pour garantir la survie de ce secteur de l’industrie, M. Sutera Sardo croit qu’une vraie conversation s’impose. « Il faut travailler de concert pour trouver des terrains d’entente afin d’accommoder tout un chacun », et mieux vaut trop tôt que trop tard!
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